Entre guinguettes parisiennes et dur travail à l’usine, Alain cherche à en savoir plus sur l’exécution de son frère, tué parce qu’il était résistant communiste. Grâce aux différents points de vue habilement présentés, le deuxième tome des Années rouge et noir cerne finement la France des faux semblants d’après-guerre.
La guerre terminée, les collaborateurs notoires se cachent ou sont en prison. Bachelli fait partie de la dernière catégorie. Depuis sa cellule, il tisse sa toile pour préparer sa sortie. Connaissant le passé trouble d’Agnès maintenant à Matignon, il fait pression pour obtenir une libération anticipée. Simone, devenue journaliste, mène une enquête qui la pousse à s’intéresser à Agnès, entre autres. Quant à Alain, il travaille comme ouvrier chez Renault. Sur fond de tension entre les salariés et les syndicats, il tente de percer le secret sur la mort de son frère exécuté en fin de guerre.
Centré sur Alain, ce tome dépeint le portrait de la France juste après la fin du gouvernement de Charles De Gaulle. Les investigations d’Alain le poussent à côtoyer le milieu politique et journalistique via Agnès et Simone mais son travail le plonge dans la grogne sociale entre patrons, syndicats et ouvriers. Le tableau est complété par ses sorties nocturnes dans certains cabarets parisiens.
Cette mise en scène intelligente de ces trois milieux nous aide à cerner cette époque dans sa complexité. L’intrusion fracassante d’un groupe de cocos au sein d’une réunion d’anciens miliciens n’est qu’un exemple des scènes savoureuses et captivantes qui émaillent ce tome.
Tout aussi efficace que dans le premier album, le dessin concentre ses efforts dans le vieillissement subtil des personnages de quelques années. Mais le trait n’oublie pas pour autant la détresse, la crainte ou la fureur, qui se lisent aisément sur les visages... Réalistes, les costumes soignés permettent de mieux s’imprégner de cette époque pas si lointaine.
Le troisième tome se fait déjà attendre avec impatience.