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Wesh ! Caribou, l’art du rire par grand froid

El Diablo, l’auteur de Wesh ! Caribou, notre élule, vous propose un petit tour au frais en plein Québec. Faites le plein d’humour le temps d’une interview qui vous donnera sûrement l’envie de voir Montréal ou de contribuer au projet Ulule !

Humour et autobiographie

Pour présenter votre album, un petit mot sur votre exil au royaume des caribous ?

El Diablo : J'ai quitté Paris, il y a maintenant trois ans. Pas sur un coup de tête, c'était un acte réfléchi et préparé de longue date. Ce n'était pas non plus pour fuir la France (bien que c'est pas mal tombé finalement, vu l'ambiance ces dernières années) mais bien plus pour aller à la découverte d'autre chose. Bon j'avoue, question dépaysement, j'aurais pu faire BEAUCOUP PLUS exotique comme l'Inde ou le Burkina Faso... mais c'est justement sur la longueur, dans les petites subtilités culturelles, qu'on se rend compte qu'à Montréal, on est vraiment ailleurs... Si, bien sûr, on ne tient pas compte du facteur climatique qui lui, te met tout de suite au diapason.

En fait le Québec m'attirait depuis pas mal de temps pour énormément de raisons. Je dois dire que jusqu'ici je n'ai pas été déçu.

De quoi est née l’envie d’en tirer un BD autobiographique et humoristique ?

J'ai toujours fait ça. Dans Lascars, ce que je racontais était déjà très autobiographique. Je me sers toujours de mon vécu en tant qu'artiste, surtout dans la BD. En l'occurrence je n'ai plus vingt ans, et je ne traine plus sous les porches à fumer du bédo avec les potes, comme j'ai pu le faire plus jeune. Ma vie a changé, je suis désormais un père de famille immigré, qui paie ses impôts à l'étranger. C'est donc forcément ça que j'ai eu envie de raconter.

Cette BD est une sorte de retour aux sources BD après un « détour » par les dessins animés…

On peut dire ça comme ça... En même temps je n'ai jamais vraiment lâché la BD (puisque je bosse come scénariste sur de nombreux projets : Monkey Bizness, Un Homme de Goût, etc.) et je n'ai pas non plus lâché le dessin animé. Je travaille actuellement avec l'équipe TRES québécoise des Têtes à claques, sur un nouveau projet.

Carte postale La Pelle jaune, une des 6 offertes pour les contributeurs Ulule

Carte postale La Pelle jaune, une des 6 offertes aux contributeurs Ulule

Pour ceux qui ne vous ont pas encore découvert dans Fluide Glacial, pourriez-vous pourquoi la pelle jaune et cônes de signalisations géants sont les emblèmes du Québec ?

La pelle jaune, c'est le symbole absolu de l'hiver québécois. Si t'en as pas une dans ton entrée ou dans le coffre de la bagnole, la vie ne sera VRAIMENT pas pareil. On parle d'un pays où il peut tomber à l'aise 50 cm en une demi-journée. Crois-moi, tu VEUX ta pelle jaune !

Le cône orange est à Montréal ce que la tour Eiffel est à Paris : un incontournable ! Comme ici, tous les métiers du bâtiment ou de la voirie sont assez saisonniers (essaie de construire un mur ou de poser de l'asphalte par moins 25), on voit fleurir à partir de mi-avril des CENTAINES DE MILLIERS de cônes oranges partout dans la ville. C'est un peu le premier signe du printemps. Et puis j'adore leur design !

L’ accent et les dentistes…

Pour donner un avant-goût à vos futurs lecteurs, quelle est l’anecdote québécoise la plus folle que vous avez mise en BD ?

Peut-être la fois où j'ai failli me faire arrêter par deux femmes-flics SUPER HOT qui croyaient que je cambriolais mon voisin du dessus. J'ai bien cru que j'allais me faire mettre les menottes... En fait j'ai presque regretté qu'elles ne le fassent pas.

Extrait de la planche sur les flics en grève

Extrait de la planche sur les flics en grève

Y en a-t-il une que vous aimeriez revivre, là maintenant ?

Je dirais une bonne quarantaine en tout, dans l'album. Si on ne compte pas l'anecdote des femmes flic, il y a de nombreuses situations que j'aimerais revivre... SAUF retourner chez le dentiste. Ici, ils sont très aimables, ils vous anesthésient huit fois avant de vous opérer une carie, mais ils en profitent pour vous mettre sur la paille. J'en ai encore mal au portefeuille.

Pas de cadeau, niveau caricature vous y allez à fond : c’est pour éviter que d’autres Français débarquent ou enfin entendre les Québécois râler comme des Français ?

Ben, en fait, je ne caricature rien. Je me contente de raconter des faits. Mais effectivement, comme beaucoup de Québécois le disent, je commence à trouver qu'il y a déjà trop d'osti de Français. Mais contrairement à la légende, il existe aussi des Montréalais râleurs... même si ça reste du râlage soft.

Après plusieurs années comme immigré dans le Grand Nord, vous trouvez encore matière à caricaturer ?

La vérité c'est que je suis tellement bien ici, que le plus dur est de trouver des anecdotes négatives à raconter, parce que dans l'ensemble il ne m'arrive que des trucs cool. Mais je ne vais quand même pas étaler mon bonheur en public, c'est indécent.

Une des 6 cartes postales offertes pour les contributeurs Ulule

Une des 6 cartes postales offertes pour les contributeurs Ulule

Vous avez souvent des aplats de couleurs ultra-vives comme décor : les décors ne vous intéressent plus ?

Pour être franc, depuis mes débuts dans Psikopat, j'ai toujours bossé les décors de façon minimaliste. L'as des décors (dans Lascars par exemple), c'est mon confrère et ami Christophe "Capone" Cholleton.

Que ne doit absolument pas faire un Français prêt à rejoindre le Québec ?

Ne surtout pas essayer d'imiter l'accent québécois, même pour mieux s'intégrer. C'est à peu près aussi ridicule qu'un parisien qui fait l'accent marseillais (et inversement).

Et maintenant comme le redoutais tous votre entourage français, avez-vous « attrapé l’accent » ?

JUSTEMENT non. (enfin, pas trop). Par contre, j'ai chopé des millions de petites expressions locales qui me mettent en joie. Savez-vous qu'une des pires insultes Québécoises c'est : « Mon écœurant »? Hahaha, je ne m'en lasse pas.

Carte postale sur la langue québécoise

Carte postale sur la langue québécoise

Mes fille, elles, se sont imprégnées davantage, et elles savent parfaitement switcher Français de France/Jouale. Dans quelques années, elles seront totalement undercover ici, quand elles auront appris à ne plus dire « Wesh ».

Pourquoi avoir choisi les éditions Rouquemoute alors que vous avez été prépublié dans Fluide Glacial et qu’ils ne sont pas du tout basés au Québec ?

Au départ, c'est parce que le projet ne convenait pas, pour des raisons qui leur sont propres, aux éditions Fluide Glacial (qui ne dépendent pas de Yan Lindingre, le rédacteur en chef). Ensuite, parce que j'aime beaucoup l'approche de Rouquemoute : c'est du sur-mesure, de l'artisanal. Un peu la différence entre dormir dans une maison d'hôtes plutôt qu'à l'Holiday Inn. Je ne regrette pas mon choix.

Est-ce qu’il y aurait dans les cartons, une sorte d’Urbanukshuk 2 le retour que vous aimeriez mettre en action au festival de BD de Montréal ?

Ça n’est pas tout à fait exclu. Ici, l'Urbanukshuk (sculpture d'inspiration inuite en cônes orange) est devenu un symbole de la vie montréalaise. Je suis très fier de cette contribution à l'histoire culturelle du Québec.

Le retour à l'envoyeur de l’Urbanukshuk

Le retour à l'envoyeur de l’Urbanukshuk...

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Commentaire (1)

Une interview qui pulse !! A la fin de l’interview on a envie de faire deux choses : lire la bd et partir au Canada... ou l’inverse...

Le 11/08/2018 à 00h40