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Anne Frank par Ozanam, « une passerelle pour la mémoire »

Ozanam a adapté Le Journal d’Anne Frank avec Nadji au dessin. Un travail pas évident car c’est la première fois que ce témoignage mondialement connu de la Shoah est mis en BD. Anne, jeune fille juive, va vivre cachée avec sa famille à Amsterdam occupée par les Allemands jusqu’à l’été 1944. Elle raconte sa vie de captive forcée, avant d'être déportée avec sa famille dans les camps. Son journal sera découvert à la fin de la guerre. Ozanam a parfaitement rendu toute l’émotion, la violence et la peur de ce témoignage bouleversant.

L’idée de cette adaptation vient de vous ?

Ozanam : Non. C’est mon éditeur qui m’a téléphoné et proposé ce sujet. Il me connaît bien. Avant de faire de la BD, j’ai réalisé le documentaire Shoah qui est la deuxième meilleure vente de DVD au monde. Pour le faire en 1995, j’avais visionné plus de 1 500 heures de vidéo, les rushes et nettoyé les films.

Extrait du Journal d'Anne Frank de Nadji et Ozanam
Un travail difficile Shoah ? Et pour le Journal cela a été compliqué ?

Oui, je suis sorti traumatisé de Shoah. Pour Anne Frank, comme je suis contre les adaptations, au départ je n’étais pas emballé. Mais mon éditeur savait que j’allais dire oui pour une raison simple, faire passer avec le Journal d’Anne Frank un message pour les jeunes générations et les amener à lire le livre après la BD. Un travail de mémoire qui n’avait pas été fait, hormis un récit illustré commandé par le Musée Anne Frank à Amsterdam. Mais une BD d’auteurs c’est la première fois.

J’ai lu et relu le Journal, surligné les passages en particulier ceux que je ne prendrai pas dans l’album. À mes yeux, il fallait qu’il y ait un rythme et une pagination de moins de 150 pages. D’autre part, je voulais des images avec des textes courts par dessus et pas le contraire.

Extrait du Journal d'Anne Frank de Nadji et Ozanam
On se sent une responsabilité accrue en adaptant un ouvrage aussi lourd émotionnellement ?

J’ai des cauchemars qui sont revenus ! Je voulais montrer la vie au jour le jour de cette petite fille aux portes de l’adolescence avec son côté fleur bleue. En le relisant, on sent le poids de l’adversité, on entend les engueulades du quotidien. Ils vivent l’horreur et ils s’engueulent peut-être pour conjurer le drame affreux qu’ils vivent... en sachant ce qui les attend si on les rafle. C’est clairement dit dans le Journal. Je suis un passeur, il me fallait aussi assumer la partie conte.

Est-ce qu’on a tiré toutes les leçons de l’Holocauste ?

Non. Du Rwanda à la Bosnie, au Cambodge, l’Histoire se répète.

Nadji a dessiné l’album. Comment est-il arrivé dans le projet ?

On a mis du temps à trouver un dessinateur. Je n’avais pas pensé à lui spontanément. Et pourtant je connaissais bien son écriture graphique. On avait eu monté ensemble un projet refusé : un polar. Nadji a fait un essai, Anne de profil à son bureau. Il a été accepté. Il a fait un très gros travail de story-board avec un dessin qui donne toute sa force au texte.

Extrait du Journal d'Anne Frank de Nadji et Ozanam
Comment avez vous bâti votre adaptation ?

J’ai fait des petits carnets dans lesquels j’avais dessiné le découpage narratif. Je donne des explications cinématographiques mais c’est Nadji qui décidait au final du cadrage réel. On a travaillé et j’ai approuvé les modifications qu’il proposait. J’ai fait deux sessions dont une première salve de 70 pages. Puis une seconde de story-board. J’ai été attentif aux planches en permanence.

Le Journal d’Anne Frank vient de tomber dans le domaine public ce qui permet de l’adapter plus facilement ?

Théoriquement, car le Mémorial Anne Frank voulait aménager financièrement ce passage dans le domaine public. Mais c’est une autre histoire qui n’a pas empêché la sortie de notre album. Je suis sorti épuisé de ce travail qui m’a pris deux ans et j’ai l’angoisse de décevoir. J’ai vu en dédicace des parents qui apprécient cette nouvelle approche du Journal d’Anne Frank et qui vont le passer à leurs enfants. Si c’est le cas, mon but est atteint. D’autant plus que pour les enseignants c’est un bon support : notre album est une passerelle pour la mémoire.

Extrait du Journal d'Anne Frank de Nadji et Ozanam

Votre prochain album ?

En mars sortira Princesse Caraboo avec Jules Bax au dessin. C’est l’histoire étonnante d’une jeune femme qui arrive en Angleterre après le Premier Empire. Elle parle une langue inconnue. Elle dit avoir été kidnappée, qu’elle est une princesse. On va la croire et elle sera même reçue par la reine Victoria. Usurpatrice ou pas ? Ce personnage hors normes a vraiment existé.

Finalement adapter me tente à nouveau. Cela m’a ouvert plein de perspectives dont celle de travailler sur un roman de Barbusse, L’Enfer moins connu que Le Feu qui se passe en 14-18. Et même peut-être un western mais à suivre.

Extrait du Journal d'Anne Frank de Nadji et Ozanam

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Commentaires (2)

Bonjour,
c'est Julia Bax, dessinatrice de Princesse Caraboo qui est brésilienne. Pas la princesse ! ;)

Le 24/02/2016 à 18h22

avatar de ADMIN

On a corrigé : la princesse a retrouvé tout son mystère !

Le 25/02/2016 à 14h39