C’était avant Préférences système et Total, les titres qui ont fait exploser l’auteur de social-fiction Ugo Bienvenu. Dans Paiement accepté, il brosse le portrait d’un cinéaste brisé alors qu’il tourne le film de sa vie. Trahi par son ami, un businessman détestable, il tombe au plus bas. Le scénario sort des sentiers battus. Il est prémonitoire de l’œuvre d’Ugo Bienvenu. Récit, coup de crayon et couleurs sont déjà bien en place.
Ce réalisateur d’âge mûr, en couple avec une oisive qui passe ses journées à peindre, est bien décidé à réaliser le film de sa vie. Pour y parvenir, il doit avaler un paquet de couleuvres, comme le fait qu’on lui impose une actrice dont il ne voulait pas. Il en va ainsi quand on use du piston : il a fait appel à un ami riche et malintentionné pour financer son long-métrage et pouvoir le sortir. Mais un spectaculaire accident de train va mettre du sable dans les rouages d’une mécanique qui, de toute façon semblait bien mal huilée…
Paiement accepté est paru bien avant Total et Préférences système, qui ont fait exploser Ugo Bienvenu dans le monde de la bande dessinée, en particulier de science-fiction. Mais le récit critique montre que les idées étaient déjà bien en places dans la tête du jeune auteur. Critique envers une société à la dérive comme celle dans laquelle on vit. À bien y réfléchir, ce qui se joue dans ces pages pourrait bien nous tomber sur le coin du nez à force de technologies de pointe mal employées, de déshumanisation et d’idées extrémistes.
Paiement accepté
© Denoël Graphic, éditions 2022
Côté dessin, même topo : le coup de crayon est déjà bien en place. Ugo Bienvenu a une capacité étonnante à s’approprier chaque case de chaque planche pour l’intégrer dans un ensemble cohérent. Les personnages se meuvent avec un naturel confondant eu égard au système repoussant dans lequel ils vivent : celui de l’argent roi, encore et toujours, comme unique perspective d’évolution dans une société basée sur l’individualisme et la propriété.
Revisiter l’œuvre d’Ugo Bienvenu, c’est aussi se rendre compte de son évolution entre ses premières publications et les dernières, au succès aussi incontestable que la qualité d’ensemble. L’étoile montante de la bande dessinée SF française ne s’est pas contentée de filer : elle continue de briller dans le ciel du neuvième art.
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