Paysage après la bataille

Paysage après la bataille est un album silencieux qui raconte pourtant beaucoup de choses. Eric Lambé et Philippe de Pierpont y invitent à l’introspection et prouvent une fois de plus que la bande dessinée indépendante a beaucoup à offrir.

Fany part trouver refuge dans une petite caravane située dans un camping isolé. Seule, à peine encombrée d’une petite valise, son arrivée intrigue les occupants du camping, bien peu nombreux à l’approche de Noël. À cette époque de l’année, les seuls résidents sont ceux qui ont décidé de vivre ici de manière permanente, parce qu’ils y sont tranquilles, parce que c’est tout ce que leur permet leur retraite ou bien parce qu’ils y travaillent. Arpentant les allées, Fany rencontre ceux que, comme elle, la vie a mené jusqu’ici. S’il s’agit de comprendre ce qui l’a menée jusqu’ici, ses rencontres sont avant tout l’occasion d’apercevoir différents parcours de vie. Tous ont leurs bagages, leurs souvenirs, leurs rêves.

Cet album quasiment muet graphique sort des sentiers battus. Les rares dialogues sont lourds de sens, même quand on parle du temps. D’un rythme lent, cet album fait ressentir la lourdeur de l’existence quand un drame la traverse. Chaque geste, événement ou rencontre est un pas de plus dans le combat que Fany mène intérieurement. Combat qui la mènera peut être à prendre son envol.

Le graphisme, tantôt ancré dans le quotidien, tantôt symbolique, sublime le récit. Les visages et expressions prennent au vif, faisant du lecteur le témoin direct des sentiments qui animent les personnages. Chaque plan témoigne des essais que mènent Fany pour tenter d’avancer à nouveau.

Cet album étonnant donne à voir une bande dessinée qui sort du traitement qu’on lui réserve habituellement. Elle donne le temps au lecteur de se délecter de chaque case et de s’imprégner de l’histoire dans laquelle les auteurs l’invitent à plonger.