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Mémoires de Viet Kieu questionnent l’identité

Carnettiste, voyageur et reporter

Comment t’es-tu intéressé à ce sujet de société et de quelle manière as-tu travaillé ?

J’ai un carnet de croquis avec moi en permanence et un dictaphone que j’utilise rarement. Je travaille aussi avec quelques photos mais la base, c’est vraiment mon carnet. Il me permet d’avoir une proximité avec les gens car je peux leur montrer ce que je fais. Ensuite, je travaille dans mon atelier, je pose les carnets devant moi. En voyage, je suis un carnettiste, un voyageur, un reporter : c’est le côté très agréable de l’artiste libre.

Extrait d'Un automne à Hanoï

Extrait d'Un automne à Hanoï

Une fois à ma table à dessin, je deviens un artisan. Je m’organise en faisant appel à mes cours de scénarios à l’école. Je structure, j’essaie de trouver une mécanique de narration. Ce n’est pas simple car je travaille à partir des témoignages que j’ai recueillis, je dois trouver comment les raconter. Il y a une longue phase d’écriture, beaucoup de story-boards. Je les refais jusqu’à ce que je trouve le bon rythme narratif.

Quel message veux-tu faire passer dans tes albums ?

Mon objectif est d’avoir une sincérité : qu’on ressente à la lecture que tel truc, je l’ai ressenti pendant mes recueils de témoignages. C’est toute la difficulté de faire passer une émotion que j’aime partager. J’ai travaillé trois ans sur les Mariées de Taïwan, on va dire que j’ai un an de retard. Mais j’ai fait plein d’autres choses entre temps car la BD, c’est compliqué pour nourrir son homme décemment.

Tu enseignes en plus de ta profession d’auteur ?

Oui, je suis prof dans une école d’arts appliqués à Aix-en-Provence. J’enseigne en section BD et illustration. J’ai quinze jours de cours par mois donc seulement deux semaines pour faire de la BD, c’est trop peu !

Extrait de Quitter Saigon

Extrait de Quitter Saigon

Qu’est-ce qui te plaît dans l’enseignement ? La pédagogie ?

Oui, c’est ce que j’ai découvert au fur et à mesure. Cela me permet de garder un pied dans ce que les jeunes aiment et lisent. Grâce à eux, je ne deviens pas vieux ! [Rires]. C’est chouette, il y a un échange précieux. Certains ont des choses à dire et c’est super, même s’il faut un peu de maturité. C’est génial de pouvoir les conseiller. C’est vrai que j’ai de gros espoirs, surtout avec des filles qui ont vraiment des choses intéressantes à dire et qui sont matures plus vite !

As-tu de projets ?

Oui, beaucoup en même temps. C’est la dure vie de dessinateur : quand on finit un album, il fait en avoir un autre tout de suite sinon on est au chômage technique. Je me penche sur une suite des Mémoires, un titre hors collection. Je m’intéresse à l’histoire du riz en Camargue, mis en place et cultivé par les Indochinois réquisitionnés en France pendant la Seconde Guerre mondiale. Le temps qu’ils arrivent, la guerre était finie.

Extrait de Little Saigon

Extrait de Little Saigon

Ils n’avaient donc plus d’effort de guerre à fournir, l’administration les a envoyés en Camargue pour faire pousser du riz. Je travaille avec un journaliste, Pierre Daum à partir de ses recherches. Il y a une part importante de réécriture mais c’est un soulagement de me consacrer essentiellement au dessin. La BD devrait sortir fin 2017.

Sinon je mène des projets avec mes copains marseillais du Zarmatelier comme Eddy Vaccaro. On voudrait retrouver l’ambiance du Club du suicide. On bosse sur un récit entre Venise et New York à l’époque de Casanova et de Mozart. Une histoire inspirée de personnages réels. Je cherche un souffle romanesque, une ambiance, une reconstitution historique avec des idées très actuelles. L’idée est de creuser la grandeur et la décadence d’un homme qui ne sait pas s’arrêter...

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