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Le Voleur d’estampes, art japonais et révolution

Camille Moulin-Dupré, passionné et touche à tout, offre avec Le Voleur d'estampes un travail remarquable tant par sa richesse que par son dessin impeccablement reproduit des estampes japonaises. Méticuleux et curieux, il parle avec passion de cette première expérience dans le neuvième art qui dévoile déjà son talent de conteur et de dessinateur.

Un artiste passionné

Quel est ton parcours ?

Camille Moulin-Dupré : Je suis fils d’artiste. Mon père a toujours été fan des images : il ramenait des estampes du Japon. Assez rapidement j’ai su que je voulais être artiste. J’ai d’abord fait une fac d’arts plastiques puis les Beaux-Arts pendant cinq ans. Je fais du dessin sur ordinateur depuis que j’ai quinze ans.

Le voleur d'estampes

Aux Beaux-Arts, je me suis mis à la bande dessinée et à l’animation. À la sortie l’école, on m’a proposé de faire Allons-y Alonzo, un court métrage d’animation avec une vraie narration en cases de BD sur la vie de Belmondo. Après ça, j’ai failli partir sur un deuxième court métrage qui devait s’appeler Le Voleur d’estampes mais on m’a proposé de bosser dans le jeu vidéo à Angoulême. Que je fasse du dessin animé, du jeu vidéo ou de la bande dessinée, j’utilise toujours les mêmes outils. Je me considère plus comme un réalisateur que comme un auteur de bande dessinée.

Le Voleur d’estampes est finalement une bande dessinée, pourquoi avoir choisi ce format ?

J’avais vraiment envie de faire un livre, d’avoir un objet à contempler. Je pense que j’ai fait cet album pour pouvoir dessiner des paysages en triptyque. L’idée c’est de reprendre Les Cinquante-trois Stations du Tokaido de Hiroshige ou les Trente-six vues du Mont Fuji d’Hokusai mais en y ajoutant de la narration. J’aime bien créer quelque chose d’un peu original et ça fait un sacré bout de temps que je m’intéresse à la narration en cases.

Le voleur d'estampes

Pour moi, il est évident que l’estampe est l’ancêtre du manga et de la BD franco-belge. Il y a des planches d’Hiroshige qui me font penser à du Hergé et des planches d’Hokusai qui me font vraiment penser à Akira. Ces planches ont 150 ans et pourtant elles me paraissent tellement contemporaines. J’adore l’estampe japonaise, qui est pour moi la plus belle des lignes claires : c’était un défi de faire de belles images à mon tour.

Et comment est née cette passion pour la culture japonaise…

J’ai eu la chance de ne jamais avoir de tabou de mon père sur le manga, ce qui était clairement le cas pour beaucoup dans les années 90. J’ai toujours eu une passion pour les mégalopoles, notamment Tokyo : j’aime autant le côté moderne que traditionnel du Japon.

Et je suis un vrai geek : beaucoup de jeux vidéo m’ont influencé, mais c’est surtout Muramasa : The Demon Blade qui m’a donné envie de faire le livre. Bosser dans le jeu vidéo m’a appris à dessiner les objets sous tous leurs angles et à faire énormément de réutilisation : j’ai pu adapter ces techniques pour mon album.

Le voleur d'estampes
Parle-nous de ton travail de recherche que l’on sent très poussé…

À la base, j’ai fait pas mal de voyages, lu de livres et visité d’expos. Je télécharge aussi tout ce qui existe sur les estampes japonaises depuis très longtemps. J’en regarde en permanence ! Je voulais qu’on retrouve le trait de l’estampe, pas que ce livre soit juste japonisant. Ces recherches m’ont beaucoup cultivé, car maintenant j’arrive à reconnaitre le trait de chaque artiste. Je me suis aussi intéressé à l’architecture des maisons japonaises.

Dans le deuxième tome, il y aura un temple japonais : je me suis donc intéressé à l’architecture de ce sanctuaire, aux différents types de bâtiments, à telle époque, leurs noms, etc. Je pourrais faire une cartographie de cette ville imaginaire. Pour le personnage du voleur, j’ai regardé plein de films dont la thématique était le voleur individualiste. Je suis hyper fan d’un film avec Belmondo qui s’appelle Le Voleur. Mon bouquin serait une version japonisante de ce film.

Et comment travailles-tu ?

Je dessine sur une tablette avec Photoshop sur une multitude de calques. Je crée des éléments modulaires qui me permettent de déplacer chaque personnage et de répéter n’importe quel motif. Cette technique est très importante pour la composition et pour assurer 200 pages, tout en créant un univers aussi. On finit par reconnaître une rue ou la mamie qui traine devant une boutique, ce qui donne l’impression qu’il y a une vraie petite vie.


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